Pierre-Luc Granjon
Filmographie :
• Petite escapade (court métrage – 2001) : réalisateur
• Le Château des autres (court métrage – 2003) : réalisateur
• L’Enfant sans bouche (court métrage – 2004) : co-réalisateur et co-scénariste
• Le Loup blanc (court métrage – 2007) : réalisateur
• L’Hiver de Léon (moyen métrage, spécial TV – 2008) : co-réalisateur
• Le Printemps de Mélie (moyen métrage, spécial TV – 2009) : réalisateur et co-scénariste
• L’Été de Boniface (moyen métrage, spécial TV – 2011) : co-réalisateur et co-scénariste
• L’Automne de Pougne (moyen métrage, spécial TV – 2012) : co-réalisateur et co-scénariste
• La Grosse bête (court métrage – 2013) : réalisateur
• Le Chien (court métrage – 2018) : réalisateur
• The Inventor (Léo) (long métrage – 2023) : co-réalisateur
Portrait animé publié le 27 octobre 2023
Cinéma Le Drakkar – Pourrais-tu nous présenter ton parcours et ton travail ?
Pierre-Luc Granjon – J’ai fait des études à Lyon dans une école d’art appliqué, où l’on apprenait le dessin textile ou l’architecture d’intérieur, et pas du tout le cinéma d’animation. En recherchant un poste d’objecteur de conscience, j’ai eu la chance de visiter le studio Folimage à Valence, et en particulier les studios « volume », où des gens construisaient des décors, des accessoires, des marionnettes, tout ça au service d’une histoire. Ce fut comme une évidence, c’est dans ce domaine que je voulais m’investir. Avant ça, je n’avais jamais pensé travailler dans le cinéma d’animation (ou le cinéma tout court) tant cela me paraissait inaccessible. Je n’ai finalement pas été objecteur à Folimage, le service militaire obligatoire touchait à sa fin, et j’ai pu être réformé. Mais cela m’avait permis de prendre contact avec le studio et en 1998, quand la série appelée L’hôpital Hilltop a débuté, j’ai pu intégrer Folimage en tant que modeleur. J’étais payé pour fabriquer de petits personnages en pâte à modeler, et je n’en revenais pas. Je travaillais avec tout un tas de gens perfectionnés dans leur domaine, et généreux en partage de savoirs, et j’ai beaucoup appris en les côtoyant. Et en 2000 je réalisais mon premier court-métrage, appelé Petite Escapade.
Ensuite se sont enchaînés pas mal d’autres court-métrages, dont certains en papier découpé. Et puis, en 2006, Antoine Lanciaux m’a demandé de réaliser une histoire qu’il avait écrite, L’hiver de Léon. C’était le début d’une collaboration avec Antoine, qui dure jusqu’à aujourd’hui. On a écrit et réalisé ensemble Les 4 saisons de Léon, et une jolie équipe s’est formée autour des ces projets. Je pense à Samuel Ribeyron, Sara Sponga, François Cadot, Marion Charrier, Sandrine Héritier, Delphine Daumas et tant d’autres mais la liste serait trop longue.
Hôpital Hilltop – Pascal Le Nôtre – 1999 © Folimage / Siriol Production
Petite escapade – Pierre-Luc Granjon – 2001 © Folimage
Les 4 Saisons de Léon – Pierre-Luc Granjon – 2008 / 2012 © Folimage
CLD – Pourrais-tu nous faire partager un souvenir de séance de cinéma qui t’aurait marqué ?
PLG – Je me souviens qu’en sortant de la projection de Bleu, de Kieslowski, tout me paraissait beau, même les voitures. Enfin, pas les voitures en elle-même, mais les reflets sur les carrosseries. Et dans les flaques. Il faut dire qu’on était en Bretagne et qu’il avait plu pendant la séance. On était un petit groupe d’amis et tous avions l’impression de voir le monde d’un autre œil, rien n’avait changé à part le regard que nous portions sur ce qui nous entourait.
Trois couleurs : Bleu – Krzysztof Kieślowski – 1992 © Studio Filmowe TOR / CAB Productions / France 3 Cinéma / MK2 Films
CLD – Pourrais-tu nous parler de ton actualité et de tes projets ?
PLG – Après plus de 2 années sur The Inventor (Léo), j’ai enchaîné sur le tournage d’un court-métrage appelé Les Bottes de la nuit. C’est un film que je fais sur l’épinette, un des derniers écrans d’épingles que le couple Alexeïeff et Parker ont fabriqués, et que le CNC a racheté en 2012. Il faut imaginer 277 000 épingles, chacune dans un tube blanc, et pouvant coulisser de 5 mm. Tous ces tubes sont posés dans un cadre métallique et forment un écran. Quand les épingles sont enfoncées, on voit la tranche des tubes et l’écran est blanc. Un projecteur éclaire l’écran et quand on fait sortir les épingles, elles créent une ombre sur la tranche des tubes. C’est avec ces ombres que l’on dessine, elles peuvent être plus ou moins noires selon la longueur d’épingles sortie. Le film fera 12 minutes, et parle de la rencontre d’un enfant avec une petite créature de la forêt.
Les Bottes de la nuit © Pierre-Luc Granjon
CLD – Aurais-tu quelques suggestions de films ou de lectures à nous conseiller ?
PLG – J’ai découvert il y a quelques années What’s up, doc, un film de Peter Bogdanovitch (1972), avec Barbra Streisand et Ryan O’Neal. J’ai rarement autant ri devant un film et je l’ai revu depuis avec toujours autant de plaisir.
Dans un toute autre genre, Toute la beauté et le sang versé, de Laura Poitras, un documentaire sur Nan Goldin. Le film la suit dans son combat contre la famille Sackler, responsable de la crise des opiacées aux USA, et de manière plus chronologique, revient sur sa vie avec les propres commentaires de l’artiste. Une femme incroyable, on est heureux que de telles personnes existent.
Et puis Rendez-vous avec la peur, de Jacques Tourneur (1958, Night of the demon), un film où un savant très rationnel va avoir affaire à des forces surnaturelles et maléfiques. J’ai été épaté par l’atmosphère fantastique que Tourneur parvient à créer.
Little Otiq de Jan Švankmajer (2000, Otesánek), un film qui m’a surpris de bout en bout.
En livres, il y a bien sûr les Moomin, par Tove Jansson, dont La comète arrive, son ambiance de fin du monde est assez rare pour un livre dit « jeunesse ». Et Le seigneur des anneaux de Tolkien que j’ai lu pour la première fois à 14 ans, ce qui laisse pas mal de traces dans l’imaginaire.
Plus d’actualité, Manières d’être vivant, de Baptiste Morizot, où l’auteur, en pistant des loups, parvient à nous faire ressentir leur manière de vivre, sans anthropomorphisme. Et où il interroge la place prédominante de l’humain sur toutes les autres espèces.
Et puis un petit dernier, Un grand jour de rien, de Beatrice Alemagna. Des illustrations incroyables pour une histoire toute simple et magnifique, un jour de pluie en forêt.
What’s up, doc – Peter Bogdanovich – 1972 © Warner Bros. / Saticoy Productions
Rendez-vous avec la peur – Jacques Tourneur – 1958 © Sabre Film Productions / Colombia Pictures Corporation
Little Otiq – Jan Švankmajer – 2000 © Zeitgeist Films
Les aventures de Moomin – La Comète arrive – Tove Jansson – 2012 © Le Petit Lézard
Manières d’être vivant – Baptiste Morizot – 2020 © Actes Sud
Un Grand jour de rien – Béatrice Alemagna – 2016 © Albin Michel